Escalade en Dauphiné - France

Arrampicata in Italy : le BERGELL

jeudi 5 février 2009 par Jean-Pierre Claudet

Massif granitique situé au nord du lac de Côme (Italie) et faisant frontière italo-suisse, le Bergell est à environ 5OO km de Grenoble (par Turin et Milan).
Cengalo et Badile (arête N limitant ombre et lumière)
Il est essentiellement constitué d’une ligne de crête Ouest- Est, d’environ 30 km, du Pizzi Vanni (2797m) au Monte Disgrazia (3678m), point culminant du massif. De cette dorsale, se détachent plusieurs arêtes, vers le N ou le S, qui délimitent à chaque fois des bassins très individualisés.

Cengalo et Badile (arête N limitant ombre et lumière)

Le versant suisse (nord) est très glaciaire, à l’exception (notable !) de l’ensemble Badile (face NE, 1000m, arête N : 1200m, plus longue voie « D » des Alpes) et Agio di Sciora (secteur de grimpe très intéressant, notamment autour du lac barrage d’Albigna)
Côté sud, quasiment pas d’appareil glaciaire, sauf autour du Disgrazia. En année « normale », les approches sont sans neige (névés) dès fin juillet.

Tout ça pour quoi ?
Eh bien pour jouer sur certainement le granit le plus beau et le plus agréable des Alpes : très compact, mais très sculpté (bossettes, knobs, trous, écailles superficielles,…), à grain fin, donc très adhérent.
Un immense choix de voies vous attend. Tous les styles sont représentés : court/long, dalles/fissures, couché/vertical, équipé/sans rien, en vallée/en altitude,…
Dernier argument : la météo, beaucoup plus clémente que dans les massifs plus à l’ouest (Mt Blanc, Valais, Grimsel, Dammastock).

Deux outils indispensables (disponibles à Gaïa Store à Grenoble, ainsi que la carte suisse au 1/50000 n°278, Monte Disgrazia) : les 2 topos (éditions « Versante Sud ») rédigés par Guido Lisignoli. L’auteur est guide, ouvreur, mais également tenancier du très agréable camping « Acquafraggia » situé au-dessus de Chiavenna (route menant au col de la Maloja, c’est-à-dire à la Suisse et au versant nord du massif). Même s’il y a quelques chevauchements, ces deux ouvrages sont très complémentaires, précis et quasi-exhaustifs :
o « Solo granito » (2007), avec Mario Sertori, s’attache plutôt à la montagne.
o « Arrampicata sportive et moderne in Valtellina, ValChiavenna, Engadina »(édition 2006), avec Meraldi et Pavan. En plus de tous les sites « écoles », celui-ci décrit de nombreuses voies assez courtes, d’approche rapide, jusqu’à 1500/2000m, notamment dans la partie EST du massif, au-dessus de Sondrio.
Bon, les 2 sont en italien, mais avec un dico et un peu d’entraînement, on comprend vite…
Quelques observations :
-  l’éternelle question des cotations : les topos sont en cotations « françaises » (5c, .. . 6b), mais les cotations d’ouverture (cf topos d’origine dans les refuges) sont des cotations UIAA (V+, … VII). La transposition n’étant pas très régulière ni homogène, certaines cotes peuvent surprendre, en bien… ou en mal !
-  dans « Solo Granito », bien prendre en compte la cotation d’équipement « S » ou « R » (cf p.12 du livre). Ex : « S2+ » correspond à une voie bien spitée, mais où les points peuvent être tous les 5 m.
-  Ouvreurs : Lucas « Rampikino » MASPES : label qualité ! C’est le JMC local. Guide, il quadrille le massif de voies de tout niveau et toute hauteur, en équipant sur goujons depuis 1995 (inox depuis 97). Les coinceurs restent en général utiles, voire indispensables.

Je me concentrerai sur le versant italien (Sud), articulé autour d’un grand « Y » coulant vers le sud : le Val Masino. Le « Chamonix » local s’appelle San Martino, point de départ commode pour écumer la région (2 campings : le plus récent, situé avant le village, le « Sasso Remeno » possède un site internet. Le gérant parle un peu le français). Le village est petit, mais a tous les commerces de base. Sinon le 1er supermarché est à 30km.

La basse vallée comporte quelques sites à signaler : tout d’abord le Sasso Remeno, école dans un chaos d’énormes blocs de granit, souvent très sculpté, vertical, voire déversant (de 4 à 40m). Un peu plus loin, face au 1er camping, on voit sur la gauche le Pilier des pesgunfi. Le secteur du bas présente des voies intéressantes (6a à 8b), bien raides, de 1 à 6 longueurs. Après le village, sur la route des « bagni del masino », après le 2ème camping, un éperon couché émerge à droite de la route : c’est El schenun. 2 voies sympas de 6 (courtes) longueurs à gauche (approche 1mn30).
La branche EST du Val Masino se nomme le Val di Mello. Parcouru seulement par un chemin muletier, il faut prendre une navette (l’été) au village pour monter au parking de départ (2,5 km). Cette vallée, parcourue par une rivière magnifique, est une splendeur. On y rencontre de drôle de tortues à grosse carapace carrée, errant dans les prés autour des énormes blocs posés ça et là... Eh oui, c’est un « spot » mondial de blocs ! La vallée est aussi appelée (pompeusement, mais on est en Italie…) le « Yosémite italien ». Il est vrai que la rive droite est empilement de dalles, tours, éperons mais tout de même bien enserrés dans la végétation ! Au début, il est d’ailleurs difficile d’identifier les secteurs décrits dans les topos. Et ne parlons pas des sentes d’approche, fort ténues pour certaines. Réveillez l’indien qui est en vous pour atteindre par exemple les dalles d’Alkengi… Mais l’ensemble est un vallon historique où les jeux de l’adhérence et de l’engagement ont été poussés très loin par les transalpins. Il faut être très humble en début de visite…
Disons-le nettement : les secteurs inférieurs ont peu d’intérêt : équipement souvent d’époque (rare et vétuste) et un style monotone (friction, friction et re-friction !).
Le 2ème étage présente des structures « mythiques » plus variées et fréquentables : le Précipice des Astéroïdes et (notamment) sa voie historique « Océan irrationnel » (mais la marche d’approche est un peu complexe, avec un ou deux passages expos) ; le Pilier des Métamorphoses et (entre autres) sa fameuse « Luna Nascente » (fissures à protéger).
Quant au 3éme niveau… Là se cache le bijou, mais pour les costauds ! J’ai nommé la face EST du Monte Qualido, bien visible : en gros une face sud du Fou, mais plus haute (400 à 700m), plus large (1 Km) et beaucoup plus pratique (2400m d’altitude), parcourue par 20 voies. Bon équipement, en général moderne, mais élitiste et avec un ticket d’entrée à 6b/c.

Le haut Val Masino se subdivise en 8 vallons principaux, représentant autant de secteur de grimpe. Je vous laisserai parcourir le topo « Solo granito » pour tout savoir et parlerai seulement de 2 d’entre eux desservis par un refuge gardé (avec bière pression, gardien accueillant et où on peut flamber avec sa carte bancaire) :
A. Le val Porcellizzo et le refuge Gianetti (2534 m)
B. Le val di Zocca et le refuge Allievi-Bonacossa (2395 m)

Moyennant une montée en refuge « méritoire » (3 à 4h), on peut s’offrir d’énormes possibilités d’escalade de 5 mn à 1 heure de la cabane. Autour de chacune, il existe des secteurs école et des voies très courtes (2 -4 longueurs) pour rentabiliser des moments incertains, mais aussi des courses de 600m.

A. a .Voies sur goujons (+ coinceurs) : Dente della Vecchia (2913 m, « Dibona » locale) : Nombreuses voies de 6 à 10 L en face E, plus courtes à l’ouest. Dente della Vecchia (Dent de la Vieille !)
Punta Torelli (3137 m) : voie Selen (5c/6a, avec 2 longueurs plus dures).
Punta Angela (3200m, contrefort du Cengalo) : Caroselo (ouverte par 2 spécialistes locaux, nés chaussons aux pieds… équipement plus parcimonieux)
b. 2 classiques incontournables : la voie normale du Badile (PD, 2-3 rappels à la descente) et le spigolo Vinci (6a, 350m) à la Punta Angela.
c. Des voies de 250 à 500m, plus sauvages, moins équipées, en face E de la Punta Angela.
Dente della Vecchia (Dent de la Vieille !)
B. Refuge Allievi : il faudrait y rester 15 jours… En vrac, à conseiller :
Très équipées (quelques coinceurs) « Top Ten » (250 m, Quota 2585m, , 5c + 1 L2 6a+ majeur, goujons acier, préférer la descente à pied sur le col à l’E, où passe le GR), « Lady D » (400m, Punta Rasica 3305 m, 6a/6b, rocher de rêve ! très équipée), « Staphiloccus » (200m, avant-corps à côté de Lady D, 6b+, moins équipée), « Inschalla » (600m, 6b+, Punta Allievi,3121m , bien équipée).
Des voies modernes mais presque entièrement sur coinceurs : « Soli di ghiaccio » (400 m, 6b+, Quota 2510m, de magnifiques fissures-dièdres à protéger), « Filo Logico » (550 m, 6a+, Punta Allievi).
L’incontournable classique : le spigolo Sud de la Punta Allievi, ou spigolo Gervasutti ( 600m, TD-, ouvert par « il fortissimo » en 1934).

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Lady D
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Soli di ghiacco

Lady D Soli di ghiacco

Punta Allievi : spigolo Gervasutti (à gauche) et le pilier de « Filo Logico »

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Punta Allievi : spigolo Gervasutti (àgauche) et le pilier de « Filo Logico  »

Ces choix ne sont que des propositions, des invitations au voyage, des dizaines d’autres possibilités existent !
Dans presque tous les cas, vous grimperez seuls dans votre itinéraire.

Alors cet été, fuyez les lignes encombrées et rebattues d’Ailefroide, La Bérarde ou Chamonix, faites un pas de côté et découvrez une montagne aimable, où l’espace n’est pas qu’un luxe.


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